BEYROUTH JOUR 10 : le retour à Paris - FIN !!!
DIMANCHE 20 NOVEMBRE : JOUR 10 – Retour en France.
Le son strident du réveil du téléphone portable de Sultan nous tire d'un profond sommeil avec violence, il est 5h du matin. Il nous est pour le peu inhabituel d'avoir à nous lever à une heure aussi matinale, la chose n'est en rien agréable.
Je bâcle une douche rapide, je me sens dans un état quelque peu second, je ne parviens pas vraiment à réaliser que dans quelques heures je serai seul à Paris. A vrai dire je ne tiens pas forcément à rester beaucoup plus longtemps à Beyrouth, il ne fait nul doute que je finirai par vite me lasser me lasser : j'estime avoir à peu de choses près fait le tour de ce que la ville a à offrir. En revanche si véritablement j'avais le temps et l'argent nécessaires il ne fait aucun doute que je prendrai grand plaisir à quitter la capitale pour visiter plus en profondeur le pays et partir à la découverte d'un Liban plus authentique.
Nous bouclons nos valises après avoir vérifié que rien n'a été oublié dans les nombreuses pièces du vaste appartement. Mon estomac est quelque peu noué, dix jours de vacances, de repos, de découverte touchent à leur fin : adieu climat doux, adieu terrasses vivantes du quartier « Solidere », adieu café turc & chicha, adieu jus de mangue & houmous… l'hiver parisien m'attend, la monotonie du quotidien va reprendre ses droits, demain matin à 8h je reprendrai le travail L
Dès 5h45 nos bagages sont réunis dans le hall de l'appartement. Elsa s'est levée spécialement pour nous assister dans les préparatifs du départ. Nonobstant des traits tirés et une chevelure décoiffée elle s'efforce d'afficher un timide sourire. Bientôt le chauffeur palestinien nous rejoint afin de charger les bagages dans son véhicule.
Sultan voyage avec deux immenses valises, plus pesante l'une que l'autre. Son bagage à main est aussi conséquent. Lapparent 'excès s'explique aisément : avant ce court séjour à Beyrouth Sultan a passé tout le mois de ramadan en famille à Djedda en Arabie Saoudite. Il est fort amusant de constater qu'une partie non négligeable du contenu d'une valise consiste en plusieurs kilos … de dattes !!! Mon saoudien de copain se justifie en soulignant qu'il s'agit d'un cadeau, il ne peut donc pas s'en séparer aussi facilement.
Nous voilà fins prêts. Je sers vigoureusement la main d'Elsa en lui faisant part de ma reconnaissance pour son travail et sa gentillesse. Un rien troublée la frêle Erythréenne nous salue puis s'efface lentement en fermant la porte derrière nous.
L'inamical chauffeur nous dépose à l'aéroport avant de disparaître. Afin d'accéder à la salle d'enregistrement du terminal il nous faut au préalable traverser le check point du service de sécurité où le contenu des bagages est inspecté au rayon X. Malgré l'heure fort matinale une file d'attente décourageante se prolonge sur des dizaines de mètres. Sur ces entrefaites Sultan apostrophe un employé affublé d'une salopette bleue : quelques mots sont échangés en arabe, un billet de banque est glissé. L'homme s'empare alors de notre chariot et se dirige sans hésitation aucune vers le point contrôle en passant devant toutes ces personnes qui patientent depuis belle lurette. Il force ainsi l'accès avec autorité et sommant aux quelques récalcitrants de bien vouloir céder le passage sur le champ. Sultan suit l'auxiliaire sans prêter attention aux voyageurs arrivés avant nous, comme si la chose allait de soi. Je le suis avec vergogne et embarras en m'efforçant de garder les yeux baissés afin d'éviter de croiser le regard courroucé des passagers.
Il est prévu que Sultan décolle le premier, son vol est programmé à 7h40. Nous nous présentons donc dans un premier temps au comptoir d'enregistrement du vol pour Londres. L'attente semble aussi conséquente mais nul employé de bleu vêtu ne pourra ici nous être utile.
Pour ma part je suis quelque peu préoccupé par le fait que je n'ai pas de réservation sur le vol de ce matin et j'appréhende quant au billet que je vais présenter. En effet celui-ci n'est pas censé être échangeable : je croise les doigts pour que l'agent au sol de la Middle East Airlines ne s'aperçoive pas de la ruse.
J'abandonne Sultan à sa file d'attente pour me diriger vers les guichets d'embarquement pour Paris situés une centaines de mètres plus loin. Fort étonnamment très peu de voyageurs patientent mais c'est très bon signe : en effet, comme me l'a indiqué hier l'employé de l'agence Middle East, de nombreuses places doivent encore être disponibles. Je m'avance vers l'hôtesse blonde qui m'accueille très agréablement dans un français médiocre. Je tends mon passeport et mon billet en lui indiquant sur le champ que mon départ était initialement prévu dans la nuit à venir mais que ma préférence va pour un départ immédiat comme passager sur vol open. L'employée me sourit et tapote sur son clavier d'ordinateur. Elle semble effectuer diverses recherches qui semblent quelques peu inhabituelles, j'espère de tout cœur que j'échapperai aux 80$ de surtaxe ! La préposée fronce alors étrangement les sourcils et quémande de l'aide en arabe auprès d'une collègue. Les secondes me semblent être des heures.
Enfin elle se retourne de nouveau vers moi et me demande avec son plus beau sourire de bien vouloir présenter mon bagage. Ouf !!! Me voilà somme toute fort soulagé ! Tout semble donc aller pour le mieux lorsque l'homme posté devant un écran derrière elle tempête tout à coup des mots en arabe, il semble véritablement furieux. L'hôtesse échange des explications avec le gaillard et avec une collègue avant de faire arrêter le tapis roulant qui emporte ma valise. Je déglutit difficilement : « quel est le problème ? ». Elle réplique alors que mon vol est d'ores et déjà complet, me voilà donc inscrit sur liste d'attente ! L'hôtesse précise qu'il me faut me représenter ici même à 7h30 (à peine dix minutes avant l'embarquement), je saurai alors si je peux embarquer dans cet avion.
Fort dépité je rejoins Sultan. Je lui explique brièvement la situation et contre toute attente il éclate de rire. Quelque peu circonspect je lui demande en quoi c'est si amusant. La réalité est qu'il ne croit pas une seconde à mon histoire ! Il est persuadé qu'il s'agit là encore d'une de mes habituelles facéties. De son côté l'attente aux guichets d'enregistrement est interminable et lorsque enfin c'est à son tour de présenter son billet il lui est annoncé que le surpoids de ses bagages est trop important : il lui faut se présenter au guichet situé de l'autre côté du hall afin de régler quelques 90 $ de surtaxe !
Enfin nous voilà finalement bientôt l'un et l'autre délestés de nos encombrantes valises. L'heure cependant tourne vite et Sultan doit se présenter à l'embarquement. Ce n'est qu'au moment de se présenter à la douane qu'il réalise que je n'ai réellement pas de carte d'embarquement et qu'il nous faut donc nous faire nos adieux ici. Il est quelque peu inquiet pour moi : si je ne peux pas prendre ce vol il me faudra patienter 17 heures seul à Beyrouth en sachant que je n'ai plus vraiment d'argent. Nous nous serrons fort dans les bras puis il disparaît derrière les contrôles policiers.
Je me sens tout à coup comme démunis et un rien perdu. Je me retourne dépité et je réalise alors qu'un homme, posté juste derrière moi, me surveille de près. Il porte des moustaches ainsi qu'une gabardine beige : il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'un policier en civil ou d'un personnel de sécurité. Sur un ton sévère il s'adresse alors à moi en arabe. En lui tendant mon passeport je déclare -en anglais- que je suis un touriste français mais que je suis dans l'incapacité de produire mon titre de transport puisque je suis sur liste d'attente et que l'hôtesse l'a gardé en attendant de savoir si je peux embarquer. L'homme parcours le passeport avec méfiance avant de me le rendre sans piper mot. Il se contente alors de s'éloigner sans demander son reste.
Je me dire de nouveau vers les guichets d'enregistrement pour Paris, à présent la file d'attente est tout à fait impressionnante, je suis pour le coup plus que pessimiste sur mes chances de pouvoir embarquer sur ce vol. Je m'assieds sur un banc, j'observe avec une certaine angoisse l'incessant flot de passagers. Le temps me semble long, l'attente est sans fin. Je n'ai aucune envie de me retrouver bloqué ici pour des heures et je suis de surcroît tout à fait épuisé.
Il est 7h30 lorsque les derniers passagers enregistrent enfin leurs bagages. Je m'avance alors avec inquiétude vers la blonde représentante de la Middle East. En m'apercevant elle tique des sourcils d'une façon étrange, par accès de pessimisme je prends immédiatement ce signe pour une mauvaise nouvelle. De plus l'hôtesse s'avère être autrement moins amicale que précédemment. La préposée se tourne vers une collègue et commence une conversation sans se soucier de moi. Le nœud de mon estomac se serre plus encore. Elle finit par enfin se retourner en me présentant une carte : « voilà Monsieur, vous embarquez dès à présent porte 27 ». Ouf !!! Mon soulagement est certainement très perceptible, je la remercie vivement et je me précipite au contrôle de douane. L'attente y est terrible : les douaniers examinent attentivement chaque passeport et visa en prenant soin de bien noter où les étrangers ont séjourné à Beyrouth. Je n'ai malheureusement pas eu la présence d'esprit de noter l'adresse de Sultan, je me vois contraint d'essayer d'expliquer au fonctionnaire zélé et suspicieux dans quel quartier je résidais.
Enfin me voilà installé dans l'avion, le plus satisfait du monde. Une voix nous souhaite la bienvenue à bord et nous annonce que nous devrions arriver à paris à 13h où la température au sol est de… –1°C !!! Je n'en reviens pas, le choc thermique va être terrible : il fait ici à Beyrouth exactement 21° de plus !
FIN!!!